J'ai retrouvé, la semaine dernière, un professeur qui sans le savoir, a joué un grand rôle dans ma vie.
Il n'en a pas conscience, je ne lui ai jamais dit, ni même jamais dis merci. J'étais trop jeune, trop pudique, et puis je ne savais pas cet après-midi-là, à quel point son comportement allait influencer ma façon de voir, de faire face...
Mais il parait qu'il n'est jamais trop tard pour dire merci...
alors, même si la tâche est dure, parce que je dois raconter, le plus justement possible, un épisode marquant de ma vie, partagé avec… mon prof de français, j'ai pour petit soulagement, le fait qu'il ne notera pas ma copie aujourd'hui !!
Allez, je me lance...
Je me souviens d'une randonnée en montagne au-dessus du refuge de Can Picoutous, la première que je faisais avec un groupe de camarades, tous âgés de 16 à 19 ans environs.
L'adulte qui nous accompagnait et qui veillait sur nous tendrement, était donc notre professeur de français, Jean-Louis de son prénom.
Ce jour-là, alors que nous marchions depuis un petit moment, le doute s'est emparé de moi, et j'ai bien cru que je n'arriverai pas à bout de cette montagne. A plusieurs reprises j'ai eu envie d'abandonner.
Alors, se rendant compte que le courage m'abandonnait, Jean-Louis est venu marcher à mes côtés. Quand enfin je lui ai dit que je n'étais plus capable d'avancer... que ce n'était pas grave... qu'il n'avait qu'à continuer l'ascension avec nos amis... que je les attendrai assise sous un arbre, et qu'ils me récupéreraient au retour, il ne m'a pas dit non.
A aucun moment il n'a utilisé la négative.
Le plus calmement du monde, il m'a proposé d'essayer de faire encore quelques pas. D'essayer de rejoindre l'arbre que j'avais en visuel à quelques dizaines de pas. Puis, une fois l'arbre atteint, Jean-Louis m'a dit, "tu vois, tu y es arrivée alors que tu disais ne plus pouvoir faire un pas. On pourrait essayer de continuer, jusqu'à atteindre ce petit arbre que l'on voit là-bas. Tu peux y arriver, il suffit de le vouloir."
Et d'encouragements en encouragements, de silences en silences, de sourires en sourires, de blagues en blagues, il m'a aidé à atteindre le but que nous nous étions fixé au départ.
Je me souviens du sourire qu'il a eu, en annonçant que nous avions atteint le point le plus éloigné de notre périple, que le plus dure était fait, et qu'il ne nous restait plus qu'à apprécier le paysage, et le plaisir d'être ensemble.
Évidemment ces mots avaient un impact sur moi, que ni lui, ni mes camarades, ni même moi à ce moment précis, ne pouvions soupçonner. Sur le coup, je me suis juste dit : "tout compte fait, tu y es arrivée."
Mais depuis, et tout au long de ma vie, face aux coups dures, aux épreuves, aux moments de découragements auxquels j'ai dû faire face, des flashs de cette après-midi montagnarde me revenaient en mémoire.
Je me disais : allez, un pas après l'autre, un effort après l'autre, tu vas y arriver, tout comme tu y es arrivée sur les hauteurs de Can Picoutous...
Cette expérience m'a appris la confiance, mais surtout elle m'a appris le dépassement de soi. Elle m'a fait réaliser qu'en se fixant des objectifs atteignables, mais toujours plus hauts, toujours plus loin, l'ascension devient possible !!
Alors, avec plusieurs dizaines d'années de retard, je te dis : Merci monsieur le professeur. Nos week-end passés à Can Picoutous, n'étaient pas que balades, rigolades, feux de camp et bonnes bouffes, c'était aussi de belles leçons de vie et de partages. Tu comprends pourquoi, je ne t'ai jamais oublié !!!