"Le temps s'étire et se contracte. Deux journées en une. Deux, cent, mille. Mon corps se dédouble. Franco-anglais. Entrepreneur SDF. Fidèle adultère. Sauveur coupable. Frère et faux. Faux frère. Ma main voudrait caresser - mais elle s'agrippe, ripe, s'accroche - les doigts sont des griffes, elle est ma proie - la déchiqueter, la réduire en pièces, un amas de chair, des cheveux qui se détachent, des dents qui se déboîtent. La phrase lancinante, entre les tempes. This is not a love song. Je veux l'entendre crier - pas gémir. Des hurlements de louve à qui l'on prend ses petits. Il y a une heure. Il y a deux heures. Je n'ai pas voulu me laisser entraîner. J'ai refusé la rencontre avec Étienne.
J'ai refusé que nous nous rendions à l'endroit exact. Là où. J'ai refusé en bloc les souvenirs et les regrets. Je ne plongerai pas dans un février où je n'étais pas. "
Vincent a la quarantaine conquérante de ceux qui ont su se faire une place au soleil, loin de la "lose" de leurs années de jeunesse. Jusqu'à ce mois de juillet où il revient dans sa ville natale, dix ans après l'avoir fuie sans un regard pour ceux qu'il laissait derrière lui.
J'avais entendu et lu bien des choses à propos de ce roman. Beaucoup de lecteurs le trouvaient décevant, dérangeant, âpre, grinçant, violent, bref très différent des autres livres de cet auteur.
Contrairement à d'autres lecteurs, je n'ai absolument pas trouvé que Vincent, le personnage principal, soit arrogant, odieux, immonde, infect, railleur, pédant, ...
En ce qui me concerne, c'est le troisième livre de Jean-Philippe Blondel que je lis et c'est, sans le moindre doute, mon préféré. Le genre de roman que l'on ne peut refermer, qui vous prend et ne vous lâche plus.
J'ai trouvé qu'il reflétait assez justement les moments difficiles de la vie, auxquels chacun d'entre nous peut être confronté. La misère, la solitude, les préjugés familiaux, le poids du regard des autres... Vincent a ses défauts, ses faiblesses, ses forces, mais nous avons tous les nôtres !!!
J'ai aussi trouvé que le fait de tout plaquer, de changer de vie, de pays, d'oser. prendre des risques, était une forme de lucidité de courage.
Bref, on aime, ou on n'aime pas, je n'ai pas aimé, j'ai adoré... J'ai adoré cette histoire parce qu'elle ressemble à la vraie vie, parce que je suis consciente qu'elle aurait pu m'arriver à moi et parce que je comprenais très bien Vincent que j'ai trouvé très humain.
Vivement le prochain Blondel !!!